Christophe Tarkos 1963 - 2004

http://fr.wikipedia.org/wiki/Christophe_Tarkos

Sa poésie s'inscrit dans le projet général de vivifier et de défendre la langue française :

« Je suis un poète qui défend la langue française contre sa dégénérescence, je suis un poète qui sauve sa langue, en la faisant travailler, en la faisant vivre, en la faisant bouger1. »


http://tapin2.org/the-t-a-p-i-n-tape

http://www.liberation.fr/culture/2004/12/03/mort-de-christophe-tarkos-heraut-de-la-nouvelle-poesie_501561


http://poesiemuziketc.wordpress.com/2012/12/18/christophe-tarkos-poemes/

La poésie est la pensée humaine.
Le poète est intelligent. Il prépare la pensée difficile.
La pensée est engoncée, dure et pâteuse, le poète la masse, l’amollit, la réchauffe. Il entraîne l’intelligence à sortir de son engourdissement, il entraîne sa tête, les membres de sa cervelle, sa nuque et ses dix doigts à sortir. Il veut se désincruster. Il décortique la bouche et rogne le bras droit de son maître. Il s’entraîne à bouger la tête à l’intérieur de la pensée.
Le poète prépare sa pensée.
L’intelligence ne sort pas d’elle-même. Il masse le crâne, il entraîne sa vision de voir au-delà de ce qui, tari, se colle, séché, dans les plis de la pensée, il déchire son ventre. Il ne se lance pas sans préparation, le poète est intelligent, le poète va entrer dans la pensée difficile. Le poète, mouvant, se déplace dans l’espace, il s’entraîne d’être, pensant, il se pare à translater les images.
Le poète se prépare pour penser.
Il se laisse tomber dans les escaliers, il laisser tomber un filet de sable, un filet de riz fin, un filet de poudre de biscottes écrasées à la masse, il tombe de haut, il laisse échappe les kilos des sacs, il tombe des chaises, tombe des tables, tombe des arbres, il s’abandonne à tomber. La poésie est l’intelligence même, en train de naître.
Le poète crie
[...]
Christophe Tarkos, Écrits poétiques, P.O.L., 2008, p. 57.


"Le mot mot ment. Le mot mot ne veut rien dire. Pas un mot ne se met à être. Pour qu'un mot existe il faudrait qu'il veuille dire quelque chose. Un être pourrait être désigné. Un mot pourrait vouloir dire quelque chose. Un mot désignerait un être. Le mot saurait faire le mot mot. Le mot mot n'existe pas. Pour que le mot mot existe il faudrait qu'un mot signifie un être. Un être serait désigné. Un être que désignerait un mot serait un mot. Il faudrait qu'un mot veuille bien signifier  quelque chose. Pas un mot ne veut. Il suffirait d'un être d'un mot. Le mot mot n'a pas existé. Un mot mot pourrait exister. Le mot mot existerait. Qu'un être soit désigné et le mot mot voudrait dire quelque chose. S'il n'est pas un être, il n'existe pas, il ne désigne pas un être, il ne veut rien dire, il ne veut pas se mettre un être, il n'a pas un être, il pourrait exister mais il ne veut rien dire. Le mot mot ment. Le mot mot n'a rien dit. Le mot mot ne dit pas un être d'un mot. Il suffirait. Qu'un mot veuille bien désigner un être et le mot mot est. Pas un mot ne veut dire un être, n'importe quel être. L'être qui serait un mot serait celui qui serait désigné. Un mot désignerait et le mot mot serait. Le mot mot ment, le mot mot n'existait pas. Le mot mot ne veut rien dire. Pas un ne dirait un être. Pas un pour faire un être. Le mot mot ne tient pas. Pas un seul être d'un mot. Il n'y a pas un mot. Pas un pour faire un être. Pas un ne désigne un être. Pas un mot mot pour exister. Il ne veut pas exister. Le mot mot, il ne veut rien dire."

Christophe Tarkos, Caisses , P.O.L.

http://flipbook.cantook.net/?d=//www.edenlivres.fr/flipbook/publications/16635.js&oid=16&c&m&l=fr&r=http://www.pol-editeur.com&f=pdf 
Le Signe (avec Noir) 

http://brahms.ircam.fr/documents/document/21474/ 

Noir de Christophe Tarkos

Noir est mystérieux

Est obscur
Est muet
Est sombre
Est tranquille
Est étoffé

Est rempli d’étoffes où tout cri est étouffé
Tout étouffement est étouffé par ses étoffes
On n’entendra plus l’étouffement
L’étouffement restera dans le noir

S’étalera,
De s’étaler
S’ouvrira
De s’ouvrir
se gonflera
De gonfler
Respirera

Toutes les étoffes restées dans le noir comme les
meubles restent dans le noir et la terre

Toutes les sortes de terre
Toutes les sortes de couleurs de terres

De travaux
De chantiers
De tranchées

De charniers restent dans le noir

Une fois passé
Une fois arrivé

Le noir se tait
Le noir n’a pas de parole
Noir ne fera plus
Ne donnera plus que du noir

Que d’être l’osmose entre la grande couleur noirâtre
et l’assentiment d’un grand organe
noir sensible à la noirceur qui se déplace avec
les mouvements de noir

Changé par les mouvements de noir qui est
transformé par les changements de noir

Noir est ce les mélanges changeants de
l’introduction de passages à l’acte et de ce qui
est avant la masse de pensées

Avant les passages à l’acte

Ceux qui vont les déclencher

Ceux qui vont avertir

Qui avertissent
Qui se préparent

Tout ce qui prépare

Dessine les lignes invisibles
Les rides

Les interstices dans noir qui grincent

Qui font l’effet de bombes
Qui bombent le glissement des descentes
Il n’y a rien sur quoi se reposer
Sur quoi être sûr

Il y a une ouverture
Comme les pupilles s’ouvrent

Noir laisse des précisions sur les traces qu’il laisse
Avec l’aimable autorisation des Éditions P.O.L (Paris)

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